La MEDIATION d’expositions tend à créer un espace et un temps bien distincts de la temporalité et de la spatialité propres aux cadres sociaux habituels.
En effet, même si elle peut se dérouler dans des lieux tels que l’institution scolaire ou l’entreprise, elle crée un écart vis-à-vis de leur fonctionnement, questionne ainsi leurs principes fondamentaux.
Sens versus savoir
Le fondement même de la médiation est par définition non scolaire, au sens traditionnel du terme.
En effet, elle propose de
redistribuer les cartes entre savoir et pouvoir. Là où l’institution scolaire sanctionne -au double sens du terme- l’acquisition de savoirs rationnels, le médiateur mobilise une sensibilité.
Il valorise davantage la justesse d’une interprétation que l’exactitude d’une connaissance, une élaboration collective plutôt qu’une récitation individuelle.
Si le médiateur est évidemment formé et informé sur les contenus des expositions,
il s’intéresse moins à viser l’objectif habituel -restituer des savoirs- qu’à produire du sens.
Par son questionnement auprès du public, il va susciter des liens afin que le groupe trouve collectivement ses propres moyens pour s’approprier les œuvres.
Refuser la hiérarchie
Le médiateur cherche également à déjouer les logiques de performance et de hiérarchie présentes dans l’organisation du travail. Il n’est pas une figure d’autorité, mais, comme l’étymologie l’indique, un intermédiaire. Lutter contre cette verticalité et la hiérarchie qu’elle suppose, c’est aussi
faire descendre les œuvres de leur piédestal, décomplexer leur perception. Le but est non pas de les rabaisser, mais de les rendre accessibles à des publics non familiers avec les lieux et codes artistiques.
Car sans ce travail d’aplanissement, s’exerce pleinement la violence symbolique, c’est-à-dire la production d’un sentiment d’infériorité, le processus d’intériorisation de la hiérarchie sociale qui la fait percevoir par les dominés comme légitime et naturelle.
Il s’agit donc, par un cheminement réfléchi, d’
amener le groupe à ce qu’il s’autorise -avec cette fois une autorité sur lui-même, et non extérieure- la
réappropriation de ses propres ressentis et la
confiance en ses capacités de réflexion.
Véra Léon
Photographie : Véra Léon