Pour l'édition 2014 des Rencontres d'Arles,
Christian Lacroix nous propose une exposition collective, qui, mêlant des variations de techniques - de l’autochrome au scanner- et des époques de prises de vues, des supports et des formats d’accrochage, de cheminements en détours, tente de faire le portrait d’une absente. Ainsi, un faisceau de figures qui se font échos dessine
une femme aux multiples résonances, mariée tragique, de l’Arlésienne de Daudet, à la Mireille de Mistral, avec la Vénus d’Arles comme ancêtre mythique et commun, dont les reines d’Arles ravivent le souvenir. D’autres viendront s'y ajouter, comme en ricochet.
Tout comme dans ses collections de haute couture, connues pour faire s’accorder des motifs et des matières issues de différentes cultures et époques,
mettant en regard et en complicité la tradition et la modernité, l’exposition nous donne à voir tout aussi bien de la
photographie vernaculaire - les mariées et arlésiennes d’EMILE SAVITRY, les arlésiennes types d'
ARTHUR BATUT- des photographies d’arlésiennes au fil du temps par des photographes de renom - les
FRERES LUMIERES,
HENRI CARTIER-BRESSON,
LUCIEN CLERGUE- et des images, parfois de commandes, de
photographes contemporains issus du monde de l’art, de la mode, ou jouant aux frontières des deux.
Présentée dans une chapelle désacralisée, ancien couvent des carmélites, l’absente est vue à travers le prisme d’un univers de dorures, de peintures religieuses et de recueillement.
Une moquette dessinée par
Christian Lacroix vient assourdir les pas du visiteur.
Face à nous, les figures féminines de
KATERINA JEBB, irréalisées,
spectrales, flottantes obtenues à partir de scanner.
Les portraits des reines d’Arles, bien que de formats imposants tendant vers la sculpture, tiennent plus de
l’hologramme ou de l’avatar que de la personne réelle.
Leur agencement évoque à la fois la procession, la parade, le cortège et le défilé.
De même, Isabelle Adjani, en contre-jour, auréolée de flare, devient ombre et Tilda Swinton, fantôme évanescent et tremblé.
Les portraits de jeunes filles sur fond noirs,
camaïeu d’ombres, semblent baignées étrangement dans un espace autre, immatériel, d’une tonalité désaturée, comme enveloppées dans une eau sombre, et
le jeu de leurs chevelures flottantes résonne avec le mythe d’Ophélie.
On hésite soudain à dire si l’on perçoit une surface immobile ou de minuscules vagues, des vibrations à peine perceptibles.
Le tablier de Baltus semble se souvenir de la chemise de chemise de Maximilien, exécuté en 1867 au Mexique, comme de la tradition des reliques saintes. Maculé de peinture, et mis en relation avec les images qui l’avoisinent, il paraît invoquer
une vie passée à tenter un portrait impossible, une tâche inatteignable mais dont les tentatives furent sans cesse renouvelées.
A leurs côtés, les variations autour du
Secret de
GREGOIRE ALEXANDRE, qui, entre transparence et opacité,
jeu d’occultation, de reflets et de masques, traces, coulures et surimpressions, nous montrent des figures féminines qui se dérobent, très proches mais inatteignables.
Tout comme
les Apparitions de
FREDERIQUE JOUVAL.
Entre gris tendre et gris velouté,
l’apparition tremblée d’un corps derrière un voile, Salomé, homme ou femme, trace, empreinte, capturé dans la matière dense et fragile du polaroïd.
En affinité, peut-être, de tremblement à tremblement, entre présent et passé, avec cette arlésienne impossible d’
ARTHUR BATUT, superposition étrange de dix portraits d’arlésiennes en costumes, comme pour en capturer l’essence.
être arlésienne aujourd’hui, est-ce être dépositaire de cette essence-là ?
En regard des jeunes Ophélies nocturnes de
KATERINA JEBB, les arlésienne diurnes, d’ici et d’ailleurs, de
PHILIPPE PRALIAUD, tentent de comprendre comment cette mémoire concourt à l’étoffe de leur propre identité, forcément multiple et protéiforme, si elle résonne ou non avec les différents lieux et cultures qui ont laissés sur elles leurs empreintes.
Cette arlésienne plurielle, peut-on l’apercevoir,
en creux, en manque, par réverbération peut-être, dans les images de ruines photographiées par
LUCIEN CLERGUE?
Est-ce que la ville d’Arles en porte la trace, comme des signes à déchiffrer, une
prégnance accumulée ? Invisible, mais en latence ?
Peut-on la sentir, quelque part,
en sœur siamoise, au sein de l’empilement de costumes emballés de
GABRIEL BASILICO ? La goûter dans une tâche de lumière irisée chez
QUENTIN DE BRIEY?
Dans l’espace monumental, à la fois vide et plein, abandonné et hanté, d’une géométrie imparable, mais contrariée par des centaines de cages suspendues de
VINCENT STOKER ?
D’une présence pénétrante, cette photographie, et le dialogue qu’elle entretien avec les autres qui l’entourent, fait naître mille fictions qui la déplacent sans la clore pour autant : salle des pendus d’une mine ; ancienne salle de banquet sédimentée issu d’un conte où le château, comme la reine du bal, oscille désormais entre le sommeil et la mort ; vaste expérience d’un savant fou tentant désespérément d’attraper dans ses pièges une chose pourtant fuyante…
Le temps coule-t-il toujours dans un tel espace ? Est-ce le silence absorbant, hypnotique, ou le grincement continuel des chaînes métalliques ?
Peut-on l’entendre,
en résonance, dans les espaces qui semblent davantage mentaux que physiques de
CLAUDIA HUIDOBRO ? Des murs aveugles, dans un coin, une chaise, un cadre en métal, un corps de femme sans visage, seul, assis, allongé, comme enfermé. Pourtant le titre
Tout contre, pourrait laisser espérer un échappatoire, mais les murs semblent infranchissables.
S’incarne-t-elle, un centième de seconde, chez
GEORGES DUDOGNON, dans un fragment de visage, celui de Greta Garbo, qui se fait regard pénétrant et ruban derrière cette main d’homme qui la dissimule et la rend, elle aussi, inaccessible ?
Ou dans le
Ghost Mirror d’
OLIVIER SIDET?
Ou
quelque part à l'intersection des différentes photographies, dans la conversation qu'elles créent entre elles ?
Un homme cherche une femme-fantôme, et c'est le début d'une histoire déployée dans l'espace.
Exposition aux Rencontres d'Arles,
Chapelle de la Charité
du 7 juillet au 21 septembre
de 10h à 19h30
Avec le soutient de L'occitane
FREDERIQUE JOUVAL, et ses Apparitions.
Entre gris tendre et gris velouté, l’apparition tremblée d’un corps derrière un voile, Salomé, homme ou femme, trace, empreinte, capturé dans la matière dense et fragile du polaroïd.
En affinité, peut-être, de tremblement à tremblement, entre présent et passé, avec cette arlésienne impossible d’ARTHUR BATUT, superposition étrange de dix portraits d’arlésiennes en costumes, comme pour en capturer l’essence.
Lorsqu’on est arlésienne aujourd’hui, est-on dépositaire de cette essence-là ?
En regard des jeunes Ophélie nocturnes de Katerina Jebb, les arlésienne diurnes, d’ici et d’ailleurs, de PHILIPPE PRALIAUD, tentent de comprendre comment cette mémoire concourt à l’étoffe de leur propre identité, forcément multiple et protéiforme, si elle résonne ou pas avec les différents lieux et cultures qui ont laissée sur elles leurs empreintes.
Cette arlésienne plurielle, peut-on l’apercevoir, en creux, en manque, par réverbération peut-être, dans les images de ruines photographiées par LUCIEN CLERGUE ? Est-ce que la ville d’Arles en porte la trace, comme des signes à déchiffrer, une prégnance accumulée ? Invisible, mais en latence ?
Peut-on la sentir, quelque part, en sœur siamoise, au sein de l’empilement de costumes emballés de GABRIEL BASILICO ? La goûter dans une tâche de lumière irisée chez QUENTIN DE BRIEY ?
Dans l’espace monumental, à la fois vide et plein, abandonné et hanté, d’une géométrie imparable, mais contrariée, biffée par des centaines de cages suspendues de VINCENT STOKER ?
D’une présence pénétrante, cette photographie, et le dialogue qu’elle entretien avec les autres qui l’entourent, fait naître mille fictions qui la déplacent sans la clore pour autant : salle des pendus d’une mine ; ancienne salle de banquet sédimentée issu d’un conte où le château, comme la reine du bal, oscille désormais entre le sommeil et la mort ; vaste expérience d’un savant fou tentant désespérément d’attraper dans ses pièges une chose pour toujours fuyante…
Est-ce que le temps coule toujours dans un tel espace ? Est-ce le silence absorbant, hypnotique, ou le grincement continuel des chaînes métalliques ?
Peut-on l’entendre, en résonance, chez CLAUDIA HUIDOBRO et ses espaces qui semblent davantage mentaux que physiques ? Des murs aveugles, dans un coin, une chaise, un cadre en métal, un corps de femme sans visage, seul, assis, allongé, comme enfermé. Pourtant le titre Tout contre, pourrait laisser espérer un échappatoire, mais les murs semblent infranchissables.
S’incarne-t-elle, lors d’un centième de seconde, chez GEORGES DUDOGNON, dans un fragment de visage, celui de Greta Garbo, qui se fait regard pénétrant et ruban derrière cette main d’homme qui la dissimule et la rend, elle aussi, inaccessible ?
Ou dans le Ghost Mirror d’OLIVIER SIDET ?
Ou quelque part à l'intersection des différentes photographies, dans la conversation qu'elles créent entre elles ? Un homme cherche une femme-fantôme, et c'est le début d'une histoire déployée dans l'espace.